Pour les
historiens L'histoire de JIJEL remonte à quelques
2000ans. Le nom même de la cité n'est pas éclairci. Jijel tirerait son nom
du mot berbère "Ighil-Ighil", de colline en colline ou en se référant à
l'antiquité romaine, on a "Igilgili" de "Jiljil", cercle de pierres sur
lequel, la cité s'est édifiée pour échapper aux invasions venant du
nord. En effet par ses immenses plages de sable fin, la richesse de son
site, la douceur de son climat, JIJEL a attiré au cours des siècles, tous
les peuples expansionnistes de la Méditerranée.
Bloquée
entre la chaîne des Babors et la mer Démunie presque totalement
de voies de communication, à l'exception de quelques voies romaines
traversant des zones peu sûres et reliant Constantine, Béjaia, et Collo,
après plusieurs jours de marche, Jijel subira toutes les attaques, venant
surtout de la mer. Grâce à un système de défense bien conçu, la ville
affrontait victorieusement tous les assauts.
Dés
que l'alerte était donnée par les guetteurs La population civile
allait s'enfermer dans une forteresse construite à l'arrière de la ville,
à Béni-Caïd. La ville restait alors aux mains de ses défenseurs. En cas de
rupture des lignes de défense et si l'envahisseur s'avisait de poursuivre
la population, il tombait fatalement dans des gorges étroites situées
entre des collines boisées, entourées de cours d'eau, d'où d'autres
défenseurs pouvaient surgir. Plus tard la stratégie des armées occupantes
allaient reprendre à peu prés le même système de la défense de la
ville.
La vieille cité devient
citadelle Le vieux fort "des Français" aujourd'hui disparu a
était construit par le corps expéditionnaire du Duc de Beaufort au XVII
siècle. Sur son emplacement a été érigée la vieille tour Génoise utilisée
par la Garnison Turque et qui fut détruite par le tremblement de terre de
1856.
A l'Est de la
ville Sur un promontoire rocheux qui commandait l'entrée de
la cité par la mer, le fort Duquesne fut édifié sur l'emplacement de Sidi
Amer, en 1964. Les ruines furent restaurées et le port relevé
définitivement les 13,14 et 15 mai 1839.
A
l'Ouest La montagne qui domine la ville et sa région,
Mesghitane, devient sémaphore, un fortin toujours tenu à l'époque
française par une section de soldats.
A
proximité de Sidi El- Harbi et Sidi B'sir Anciens lieux de
refuge des populations civiles, les forts Saint- Ferdinand et Sainte
Eugénie, furent également bâtis.
Il ne
reste à présent en matière de vestiges historiques Que quelques
tombeaux étrusques, des pièces de monnaie en or frappées par les rois
Hamadites de Bejaia ,quelques vieux canons rouillés exposés un certain
temps devant la citadelle , ''Aïn- Romane'' (fontaine romaine), Aîouf , le
djebel quartier haut des anciens Raïs et prolongement du vieux JIJEL , Dar
Chouafa (les Guetteurs) , Ghdir Kouiras (le petit corsaire)
etc.…
L'histoire
de Jijel se situe donc déjà dans la pré-antiquité Puisque la
civilisation étrusque y a laissé des traces, comme partout, autour du
bassin méditerranéen. Les tombeaux étrusques taillés dans la pierre
sont encore visibles à la ''pointe Noire ''(Rabta). En regardant la
position de la vieille ville( l'actuelle caserne), construite sur une
presqu'île aux falaises rocheuses, défendue au Nord par la mer que ferme
un cercle d'écueils, au sud par une ceinture de collines, nous remarquons
que la place antique, avait été choisie dans un but défensif pouvant
servir de comptoir sûr aux transactions commerciales des premiers marins
de la Méditerranée.
Vers
le Xéme Siècle avant l'ère chrétienne Les Phéniciens, marins et
marchands, en quête de bases pouvant offrir le maximum de sécurité à leur
commerce, s'installèrent à Jijel où ils fondèrent un comptoir. Ce ne
fut qu 'au Véme Siècle avant J.C. que les romains vinrent occuper la
petite cité phénico-berbère, qu'ils élevèrent sous Octave en 33, au rang
de Colonia Romana, administrée par un sénat, à l'instar des villes
romaines importantes. L'importance de IGILGILI des Romains sur le plan
économique, administratif et stratégique, dura plusieurs siècles. Le
Général Théodose utilisait le port pour le débarquement de ses légions
qu'il lançait contre les chefs Numides (an 372, révolte des firmus)
hostiles à l'occupation étrangère, et menaçant continuellement la route du
blé. Le blé provenait des hautes plaines sétifiennes et était dirigé sur
Rome. Arrivant des Pays germaniques, Les Vandales traversèrent
l'Espagne et défilèrent sur l'Afrique du Nord. Ils détruisirent IGILGILI
en 429.
En
533 de l'ère chrétienne Les Byzantins venus de l'empire
Romain du Levant (Byzance), s'emparèrent de la place et les Vandales
durent se réfugier dans les montagnes (Béni-Afer, Béni-Bélaid).
Vers
650 Les premiers cavaliers de l'Islam firent leur apparition. La
religion qu'ils venaient répandre était basée sur l'égalité des droits et
des devoirs pour tous les hommes sans distinction. En échappant au
carcan byzantin, les populations autochtones et les Vandales qui
restaient, accueillirent avec enthousiasme la religion nouvelle. Le
flux arabe dura jusqu'au XI° siècle. Mais ce qui avait été édifié sur la
foi pure, devait être terni par les tractations matérialistes de certains
monarques. Jijel était alors sous l'autorité de Kairouan. L'histoire
nous apprend qu'une révolte contre Kairouan, fut étouffée dans le sang en
695. Des contingents iraniens envoyés par le gouvernement de Kairouan et
stationnés près d'El-Milia, eurent à réprimer une autre révolte en
776.
Une
nouvelle dynastie Les Aghlabides prit le pouvoir à Kairouan. Ce
qui allait entraîner une nouvelle révolte de Jijel et sa région en
913. Cette fois-ci, les Kotama, une importante tribu, rallia autour
d'elle les tribus de la région et marcha sur Kairouan, donnant naissance à
une nouvelle dynastie : la dynastie des Fatimides qui chassa les
Aghlabides de Kairouan. Les Fatimides poussèrent leur conquête jusqu'en
Egypte, occupèrent le Caire, laissant entre les mains des Gouverneurs
Zirides de Kairouan, l'administration des territoires de
l'Ouest.
JIJEL
et sa région Après avoir provoqué tous ces importants
changements, retombaient sous l'autorité des Zirides de Kairouan de 973 à
1007. Une autre dynastie parente des Zirides mais rivale, se partageait
avec ces derniers le Maghreb central. Il s'agit des Hamadites.
En
1007 JIJEL passait sous leur souveraineté. En 1045,l'émir Ziride
de Kairouan, ayant rejeté définitivement l'autorité des Fatimides
installés en Egypte, le calife du Caire dirigea sur Kairouan dissidente,
les Béni-Hilal, farouches cavaliers du désert égyptien qui allaient
envahir toute l'Afrique du nord.
Au
sud algérien La kalâa des Béni-Hammad tomba entre leurs
mains en 1050.
El-Kaid, prince hammadite Fils aîné de
Hammad Ben Bouloughine, remonta vers le Nord. Il se serait installé à
Jijel vers 1068. Un autre prince, En-Nassir s'installa à Béjaia qui devait
prendre le nom de En-Nasseria et devenir la nouvelle capitale
Hammadite. Poussant également vers le Nord, à partir de la Kalâa, les
Béni-Hillal, investirent toute la Kabylie orientale. Le faible Emir de
Béjaia, Yahia Ibn-El-Azziz, ne put endiguer ce flot de cavaliers
pillards.
A
Jijel, le palais hammadite Construit par le monarque de
Béjaia pour son séjour durant les parties de chasse, fut abandonné. Ses
occupants se réfugièrent auprès des descendants d'El-Kaid dans l'arrière
pays. Une période de chaos et d'anarchie s'en suivit. Les guerres entre
tribus reprirent. Le commerce de Jijel périclita. Ce fut la fin de la
dynastie hammadite.
En
1130 Une nouvelle dynastie fondée par El-Moumen, les
Almohades, s'établit à Béjaia. Les Almohades rétablirent l'ordre. Ils
régnèrent sur toute l'Afrique du Nord et la moitié de l'Espagne jusqu'à
1273, après avoir chassé les Almoravides, maîtres du Maroc et de l'Espagne
mais ne purent jamais reprendre la Sicile tombée entre les mains du
puissant roi, Roger le Normand. Conquise par les Aghlabides en 827, la
Sicile passait entre les mains des Fatimides en 917. Elle leur fut enlevée
en 1090 par les Normands, après un siège qui dura de 1058 à
1090.
Après
la conquête de la Sicile sur les Arabes Roger le normand,
s'intéressa aux côtes voisines, les côtes de l'Afrique du Nord où il
voulait établir une base. JIJEL fut choisie et en 1143, la flotte normande
incendia la ville. Les habitants de la ville se réfugièrent à Béni-Caïd et
devant le vide laissé par ces derniers, les normands préfèrent se retirer
mais pas pour longtemps. Les Djidjelliens méfiants bâtirent sur les
hauteurs de Béni-Caîd, la fameuse forteresse qui devait désormais garantir
leur sécurité.
Les Normands revenaient souvent à époque
fixe Leurs raids durèrent une dizaine d'années sans
pouvoir réduire la place. Une légende locale rapporte qu'un matin de
l'Aïd el-fitr, les voiles des bateaux normands apparurent à l'horizon. Une
mère qui avait préparé la pâte pour les crêpes de la fête, dut assister au
départ de ses sept garçons qui quittèrent la forteresse avec leur
compagnons d'armes pour arrêter l'ennemi en rase campagne. Revenu chez
elle la mère au lieu des crêpes confectionna une petite galette pour elle
seule est prit le deuil. Les normands furent repoussés et le soir les sept
guerriers, retrouvèrent sains et saufs; leur mère. Depuis ce jour-là,
plusieurs vieilles familles de JIJEL, issues sans doute des sept
guerriers, font une petite galette, en même temps que les crêpes le jour
de l'aïd.
Revenons
à l'histoire Ne pouvant réduire par les armes, la place si
convoitée, les normands de Sicile, préférèrent établir des échanges
commerciaux pacifiques avec les Djidjelliens. Ce qui ne tarda pas à
attirer vers Jijel les Grandes Républiques Maritimes Italiennes de
l'époque : Venise, Gêne et Pise. De ce fait, sous le nom de " GIGERI ",
Jijel entrait de plain-pied dans la vie maritime du monde
Méditerranéen.
D'après les historiens et notamment l'historien arabe
El-edrisi Contemporain de Roger le Normand, Jijel et sa
région produisaient en abondance, des céréales, du miel, du beurre, du
bois pour les constructions navales, du chanvre, du charbon de bois, des
noix, du poisson séché et des peaux de fauves.
Sous les Almohades dans la première partie du XII°
Siècle Puis sous les Hafsides, les Abdewalides, et les
Mérénides au XIII° Siècle, le commerce des Républiques italiennes avec le
port de Jijel, atteignit son apogée. De violentes querelles éclataient
entre les concurrents pour les monopoles et étaient appuyées par des
comptoirs fortifiés et des vaisseaux de guerre, de Jijel à Tunis. A
Jijel, à la fin du XIII° Siècle, les Pisans éliminèrent les Génois et les
Vénitiens. Mais le Sultan de Béjaia dépendant des Hafsides de Tunis,
accorda des avantages à la République de Gênes.
Les
Génois allaient se maintenir à Jijel du XIII° au XVI°
Siècle Entre temps vers 1280, les mêmes avantages furent
accordés au Roi d'Aragon, Pierre III. Le commerce avec Jijel, était donc
partagé entre Génois et Aragonais. Néanmoins, les Génois, fortifiés et
tenant garnison, restaient maîtres de la Place. Les espagnols préférèrent
s'installer à proximité, à Bejaia. Ce choix devait plus tard modifier
le cours de l'histoire du Littoral de l'Afrique du nord, et concéder au
petit port de Jijel, voisin de Bejaia, un rôle de premier plan dans les
grandes batailles navales du XVI° Siècle qui allaient assurer à l'Algérie,
la maîtrise de la Mer Méditerranée.
Au XV°
Siècle Après la chute de Grenade en 1492, et l'insurrection des
Musulmans Andalous pressurés et torturés sans relâche par le Cardinal
Ximenès de Cisneros, les Espagnols dont le fanatisme religieux était
attisé par le sinistre Inquisiteur, voulaient poursuivre les Musulmans
d'Andalousie jusque dans leurs retranchements. Tout fut mis en œuvre par
l'Espagne pour l'occupation des ports de l'Afrique du Nord. e
puissantes Armadas canonnaient les villes du Littoral. Le corsaire
Espagnol Pedro Navarro s'empara en Algérie de Mers-el-Kebir en 1505, de
Béjaia en 1510, Dellys, Cherchell et Mostaganem en 1511.
Alger
dût céder le rocher qui protégeait le port Où une forteresse
fut édifiée, le ''PENON '' appelé par les habitants ''L'EPINE AU CŒUR'' et
qui tenait la ville sous la menace permanente de ses canons.
Pour
des questions politiques intéressant l'Europe L'Espagne
préférait réduire son occupation aux seules villes de la côte, érigées en
citadelles imprenables, grâce à la multiplication de forteresses
puissantes tenues par des garnisons fortement armées.( Certaines de ces
forteresses sont encore visibles, notamment à Béjaia). Cette occupation
restreinte, ordonnée surtout par Ferdinand le Catholique (1479-1516)
isolait les garnisons obligées de razzier les campagnes environnantes pour
se ravitailler.
Les
rois Hafsides de Tunis Alarmés par le péril espagnol qui
menaçait toute la côte Nord Africaine, de Mélila à Tripoli, font appel à
deux célèbres corsaires, musulmans, BABA AROUDJ et son frère KHIRREDINE,
surnommés ''BARBEROUSSE '' ou '' BARBAROUSSA''.
Baba
Aroudj et Kherdinne Fils de Yacoub, un sicilien musulman, sont
nés à Mételin respectivement en 1474 et 1476. Leur père eut également deux
autres fils : Elias et Ishak.
Dés
l'âge de 13 ans, Arroudj accomplit son premier exploit en mer De
1504 à 1510, il força le blocus espagnol et ramena en Afrique du Nord, de
nombreux musulmans d'Andalousie. Ces exploits lui valurent un grand
prestige dans le monde musulman. Les rois Hafsides de Tunis lui
accordèrent une base dans l'île de Djerba. A leur appel, les deux
frères appareillèrent pour libérer les ports de la côte Ouest en
commençant par Béjaia. La première attaque eut lieu en 1512. Arroudj
perdit son bras gauche dans la bataille. Il se replia sur Tunis pour
reconstituer la flotte. Deux ans plus tard, en 1514, la flotte
reconstituée mouilla dans les eaux djidjilliennes. Une intervention rapide
de Baba Arroudj, avec le concours de la population, anéantit la garnison
génoise installée à Jijel depuis le XIII siècle. Reconnaissants, les
djidjelliens fournirent à Baba Arroudj, déjà connu d'eux, de nombreux
contingents de marins et de soldats. Jijel ou ''GIGERI'' de l'époque
des grandes canonnades, devenue une base fortifiée des frères Barberousse,
commençait à faire connaître la grande puissance d'Alger.
En
1515, l'escadre renforcée de nombreuses unités et de nouvelles
recrues Quitta Jijel. Elle se présenta devant la porte Sarrasine
et le bombardement des positions espagnoles de Béjaia dura deux jours.
L'ennemi bloqué dans ses forteresses et ne pouvant faire une sortie par le
sud, dans un pays hostile, dût se rendre. Béjaia était libérée.
Sollicitée
par Sélim Ettoumi Cheikh d'Alger, pour détruire le ''PENON'',
considéré imprenable par les Espagnols, l'escadre Algérienne quitta Jijel,
occupa Cherchell d'abord puit remit le cap sur Alger. Après quelque
coups de canon échangés avec la forteresse ennemie, les deux frères
décidèrent de s'installer en premier lieu dans la ville. Tandis que
Arroudj continuait ses raids pour la libération des villes et des ports
Algériens aux mains des espagnols, Khair-eddine devait organiser
l'administration de la ville d'Alger. Cherchell, Ténès, Miliana étaient
libérées. Tlemcen suzeraine de l'Espagne attendait son tour. Baba
Arroudj éleva partout des forteresses et avant d'atteindre Tlemcen,
fortifia El-Ghazaout qu'il confia à une partie de ses éléments
djidjelliens. Tlemcen fut libérée mais les espagnols envoyèrent de
nombreux renforts. Baba Arroudj succomba sous le grand nombre des
assaillants en 1518, prés de Rio Salado.
A la
nouvelle de la mort de Arroudj Les Algérois mécontents de voir
toujours le ''Pénôn'' en place, manifestèrent de la nervosité. Certains
clans de la ville allèrent jusqu'à conspirer contre Khair-eddine et ses
compagnons qui jetaient déjà les bases de la régence d'Alger. Afin
d'authentifier ses raids en Méditerranée et obtenir pour cela, des lettres
de course au service d'un monarque, Khair-eddine s'adressa au sultan Salim
1er d'Istanbul qui lui décerna le titre de Pacha et Emir des Emirs
(Beylerbey). Alger suzeraine de la Turquie, reçut de nombreux renforts
et de l'artillerie. Ces renforts arrièrent à temps pour briser une
tentative Espagnole d'occupation totale de la ville. En effet les
vaisseaux Espagnols commandés par Hugo de Moncada subirent un échec
retentissant et ceux qui échappèrent aux canons d'Alger, se retirèrent
abandonnant le Penôn et sa garnison. Mais les conspirations contre
Khair-eddine gagnèrent déjà quelques villes de l'ouest et certaines tribus
des environs d'Alger. Khair-eddine préféra se replier en 1520 sur
Jijel, sa base de départ, dont il songeait faire sa capitale. Les
Djidjelliens le reçurent triomphalement. De son côté Khair-eddine faisait
profiter la ville de tous les produits de ses courses en mer. Toujours
à la tête des contingents turcs et djidjelliens, il s'empara de
Constantine en 1520, de Collo en 1521, et de Bône 1522.
En
1525, des évènements graves le rappelèrent à Alger Khair-eddine
quitta Jijel pour Alger qui allait devenir sa capitale. Par
reconnaissance, Jijel fut la seule ville à l'époque, autorisée à pratiquer
la course en mer.
Les
Djidjelliens installés à Alger ou demeurés chez
eux Bénéficiaient de nombreux avantages. Ils étaient exempts
d'impôts, portaient le costume turc et pouvaient croiser leurs épées
contre celles des Janissaires, dans les duels sans recourir à la peine de
mort. Comme les turcs ils échappaient aux juridictions de droit commun et
sont jugés par le tribunal réservé uniquement aux janissaires. A Alger,
Khair-eddine décida d'en finir avec le Penôn dont la menace pesait
toujours sur la ville. La forteresse subit un intense bombardement qui
dura 20 jours, et son gouverneur, Martin de Vargas, se rendit avec sa
garnison.
Alger
était définitivement libérée de l'emprise espagnole Si le port
d'Alger était un médiocre mouillage, entouré d'écueils et exposé à tous
les vents, sa position stratégique qui lui permettait de contrôler toute
la méditerranée, du détroit de Gibraltar au canal de Sicile, l'emporta sur
le mouillage, pour servir aux opérations militaires. Khair-eddine fit
construire un môle long de 200 mètres, large de 25 mètres et haut de 4
mètres. Ce môle réunit la ville aux îlots qui commandent l'entrée
d'Alger par la mer. Amélioré par la suite, pour devenir plus tard,
l'actuelle Amirauté, le môle marquait le début du port de guerre de la
Régence.
Toujours
aidé par les djidjelliens Khair-eddine poursuivit ses combat en
mer avec le titre d'Amiral de toutes les flottes, décerné cette fois-ci
par Soliman III en 1533. Il s'empara de Tunis qu'il dût abandonner, a
cause de l'aide apportée à Charles Quint par l'escadre Génoise d'Andréa
Doria en 1535, mais conserva Bizerte.
Le
Bénédictin HAEDO Contemporain de l'état Algérien organisé par
Khair-eddine raconte à propos des marins Algériens : "Naviguant pendant
l'hiver et le printemps, les Corsaires Algériens parcourent la mer du
levant au couchant, se moquant de nos galères………. " Sachant que lorsque
leurs galiotes si bien espalmées, si légères, rencontrent les galères
chrétiennes si lourdes et si encombrées, celles-ci ne peuvent leur donner
la chasse. Elles ont coutume pour les railler, de virer de bord et de leur
montrer l'arrière. La supériorité des Algériens tenait non seulement à
l'adaptation rationnelle des galères et des brigantins à la guerre de
course mais à l'entraînement et à la discipline…….. Ils sont si
soigneux de l'ordre, de la propreté et de l'aménagement de leurs navires
qu'ils ne pensent pas à autre chose, s'attachant surtout à un bon arrimage
pour pouvoir bien filer et louvoyer. "Enfin pour la même raison, il n'est
permis à personne, fût-ce le fils du Pacha lui-même de changer de place ni
de bouger du lieu où il est……." Khair-eddine écuma les eaux
siciliennes, celles de Calabre et des Pouilles, enleva aux Vénitiens
SCYROS, ATHMOS, PAROS et EGYNE (1538). Il prit d'assaut CASTEL NUEVO en
1539, battait une flotte chrétienne devant CANDIE (Crète) et aida les
Français alliés de la Turquie contre l'Espagne de la maison d'Autriche, à
bombarder NICE en 1543. Le combat eut lieu dans le golfe du Lion où les
vaisseaux Espagnols qui bloquaient tout trafic vers Marseille, eurent le
dessous.
Khair-eddine
mourut en 1545 Loin de sa base de départ, JIJEL que les
Espagnols par représailles, allaient détruire en 1611, sous le feu d'une
puissante flotte commandée par l'Amiral de Santa Cruz. Malgré les
représailles continues contre les ports Algériens organisées par les
croisières de bateaux espagnols, italiens, anglais, hollandais, le
prestige de la Marine Algérienne, dépassait le monde de la
Méditerranée. JIJEL dut subir le 22-7-1664 à 7 h du soir une attaque
d'envergure déclenchée par Louis XIV, le monarque français, oubliant les
anciennes alliances de son pays avec l'Algérie et ne songeant qu'à
augmenter son prestige vis-à-vis des pays chrétiens d'Occident.
Sous
la pression de son ministre Colbert Intéressé par les routes de
ses compagnies commerciales d'Afrique, un puissant corps expéditionnaire
commandé par le prince bourbon, le Duc de Beaufort et oncle du Roi, fut
débarqué à Jijel par l'Amiral Duquesne, le 23 juillet 1664 prés de
Sidi-Amer.
Un
fort ''le fort des français'' (Fort Saint-Ferdinand) Pour les
armées de Louis XIV et ''Bordj-Echetti'' pour les vieux Djidjelliens, fut
construit prés du vieux cimetière de la ville( ce vieux fort aujourd'hui
disparu, était debout jusqu'en 1933 ). Les régiments de Navarre, de
Normandie et de Picardie qui constituaient les points avancés, furent
coupés à Beni-Caîd par les troupes djidjelliennes, de leurs arrières tenus
par les régiments des ''Gardes françaises, ''des Volontaires de Toulon et
la marine; et le régiment de Picardie fut décimé dans une
embuscade. Assiégés de toutes parts, les troupes qui tenaient la ville,
rembarquèrent en hâte, le 31 Octobre 1664, abandonnant ce qui restait des
régiments à l'extérieur. Les restes de ces régiments acceptèrent de se
mettre au service des Turcs, moyennant une conversion à la religion
musulmane, rejoignant par là ce qu'on appelait déjà en occident, les
Capitaines Renégats. Après ces évènements qui confirmèrent la célébrité
de ''Gigeri'' comme place corsaire imprenable, dans le monde occidental et
méditerranéen Jijel reprit ses relations avec les Beys de Constantine et
allait connaître une ère de paix en s'adonnant à ses activités
commerciales traditionnelles. Ce fut alors l'avènement de certaines
familles placées sous le saint patronage de personnages illustres dont les
hautes qualités morales, religieuses ou militaires, avaient forcé le
respect et la reconnaissance de leurs contemporains : SIDI BOUBHAR , LALLA
MESGHITANE, SIDI AHMED AKELAL, SIDI B'SIR, SIDI EL-HARBI, LALLA Z'BIRIA,
SIDI M'RABET MOUSSA, SIDI EL HOCINE, M'RABTA SEKHRIA , M'CHKTA, SIDI
MEZOUAR, SIDI AMER, SIDI AHMED AMOKRANE. Tous les mausolées situés aux
abords et au centre de la ville, constituaient pour la population, un lieu
de recueillement et de prière. Parmi ces mausolées, certains ont
disparu. Le mausolée de SIDI AHMED AMOKRANE est toujours conservé sur
la colline ''Korn-el-Djebel''. Sidi Ahmed Amokrane est considéré comme
le patron de la ville. La paix régna à Jijel jusqu'en 1803. Mais cette
paix fut troublée par un fanatique marocain, Abou Dali ben El-Harche qui
fomenta des insurrections contre les Turcs à travers toutes les régions de
l'actuelle Wilaya.
Abou
Dali a la tête des tribus séditieuses s'empara de Jijel et assiégea
Constantine. Le Bey de Constantine, Osman le Borgne (B'SIR),
homme très pieux et pacifique repoussa Ben El-Harche et marcha sur Jijel,
à la tête de 2000 Janissaires et 3000 cavaliers. Arrivé dans les parages
de Bir El-Ghder, il tomba dans une embuscade et fut tué avec plusieurs de
ses compagnons. Les survivants ramenèrent sa dépouille qui avait été
ensevelie près de l'ancienne forteresse où se trouve le mausolée de
Sidi-El-Harbi, en attendant les renforts du Dey d'Alger. Une légende
locale racontée par certaines vielles familles de la ville dont il demeure
le Saint Patron, nous fait savoir que la martyr refuse tout mausolée.
Chaque fois qu'une âme pieuse s'avise de construire le mausolée du
saint Homme, il est aussitôt détruit. Devant l'anarchie qui s'instaura
dans la ville, après les troubles fomentés par Boudali, des actes isolés
de piraterie dirigés contre les petits caboteurs algériens eurent
lieu. A la demande de la population, le Dey d'Alger dépêcha la Marine
officielle. Bou Dali fut capturé et l'ordre rétabli.
Les
Djidjelliens maîtres de leur ville Rétablirent leurs rapports
commerciaux avec les pays voisins dont Tunis était le centre d'attraction.
Cette période d'apaisement dura une trentaine d'années. En 1830, les
troupes françaises s'emparèrent d'Alger et en 1837 de Constantine. Jijel
coupée de la double autorité du Dey d'Alger et du Bey de Constantine
bénéficia d'une certaine autonomie pendant deux ans. Entre temps, un
caboteur français, (Le brick "l'Indépendant") jeté sur la plage
d'El-Kennar par le mauvais temps, fut pillé par les riverains, qui
emmenèrent en captivité les gens de l'équipage demandant pour les relâcher
une rançon de six mille Francs. Or, cet acte précipita la conquête de
Jijel. L'histoire locale rapporte que des familles entières s'étaient
jetées à la mer du haut de la falaise qui borde la vieille ville, avant
l'arrivée des troupes d'occupation, qui eut lieu le 13 mai 1839. Le
premier mouvement insurrectionnel eut lieu du 17au 22 septembre 1841. Les
emissaires de l'Emir Abdelkader bien accueillis, furent suivis par toute
la population de l'actuelle Wilaya.
La
lutte populaire dura jusqu'à en 1842 Les insurrections armées
reprirent en 1845-1847-1851. Celle de 1851 fut la plus meurtrière. Le
général de Saint-Arnaud, chargé de la pacification de Jijel et sa région,
à partir de Mila, s'y rendit célèbre par les enfumages des grottes où se
réfugiaient les populations civiles.
En
1856, dans la nuit de 21 au 22 Août Un terrible cataclysme
frappa Jijel. Un tremblement de terre suivi d'un raz-de-marée, réveilla en
sursaut la population qui put fuir vers la campagne environnante dés les
premières secousses. Seules deux femmes et trois enfants périrent dans la
catastrophe.
Un bébé enseveli sous les décombres fut
sauvé miraculeusement par le berceau renversé sur son petit corps. Le bébé
devenu le grand-père M'SILHA vécut longtemps et eut une nombreuse
descendance. Mais la vieille cité marquée par plus de 20 siècles
d'histoire fut détruite.
Oui,
IGIGILLI des romains Venus bien après les Etrusques et les
Phéniciens, Jijel qui avec sa région fut à l'origine de la dynastie
Fatimide, ''JIGERI ''des Rais qui, sous les frères Barberousse, fit
trembler les marines Chrétiennes, Jijel, vainqueur des armées de louis
XIV, disparut à jamais avec ses tours de gué, ses maisons et ses
mosquées. Le même destin qui lui réserva un premier rôle dans
l'histoire des grands combats navals, voulut sans doute lui épargner
l'humiliation du joug des armées colonialistes. Celles-ci après la
catastrophe, ne trouvèrent de la vieille ville, qu'un rocher couvert de
décombres qu'elles utilisèrent pour la construction de leur
citadelle.
En peu
de temps la nouvelle ville commença à s'édifier
(1857-1858). La nouvelle ville construite par le génie de
l'armée française attira de nombreux colons, venus la plupart des
campagnes et quartiers misérables des pays européens de la Méditerranée.
Ces immigrants moyennant une naturalisation et une concession de terre
spoliée, allaient devenir, grâce au code de l'indigénat qui livrait à leur
merci, les populations légitimes du pays, une aristocratie nouvelle dans
Jijel et sa région.
Expropriations,
chômage, impôts écrasants Lourdes amendes de toutes sortes,
tentatives d'évangélisation des campagnes, décret Crémieux qui élevait les
juifs Algériens au rang de maîtres du pays, réquisitions arbitraires de
travailleurs, toutes ces exactions, trouvèrent une population musulmane
attentive au message de Cheikh El-Haddad et son disciple El-Mokrani en
1871. Encore une fois, l'insurrection fut étouffée dans le sang et la
colonisation put parachever à loisir, son extension par des expropriations
massives et le déplacement des populations dans la région de Guelma et
Temlouka. De nouveaux colons arrivèrent d'Alsace et de Lorraine
reprises par les Allemands après la défaite de Napoléon III à Sedan en
1870.
Un
nouveau ''Strasbourg'' Fut construit à une dizaine de
kilomètres de Jijel (actuellement Emir-Abdelkader). Ne pouvant tenir
devant les régiments d'une des plus fortes armées d'Europe, les Algériens
choisirent la bataille politique.
En
1911 Le premier journal de tendance nationaliste ERRACHIDI était
imprimé à Jijel. Ce journal attaquait le code de l'indigénat, les
réquisitions de travailleurs, les exportations et le service militaire
rendu obligatoire aux Algériens musulmans en 1913.
La
guerre de 1914 Arrêta momentanément les premiers mouvements
politiques qui reprirent au cours des années vingt pour atteindre leur
intensité dans les années trente. Trois faits importants à signaler à
Jijel durant cette période : " La construction par volontaires
en 1934 de la première médersa en langue arabe et dont la première prière
fut posée par le Cheikh Abdelhamid Ben Badis. " Les premières
luttes syndicales en 1936 avec grèves sur le tas dans les usines de liège
et les quais d'embarquements. " La création de la première
équipe de football (JSD) entièrement musulmane, en vert et blanc, face à
S.C.D tricolore qui ne pardonnera jamais le départ de ses joueurs
musulmans. (1936) " Il y eut également la première section de
Scouts Musulmans Algériens ( S.M.A)sous l'égide de la
J.S.D.(1936)
La
déclaration de la deuxième guerre mondiale en 1939 Qui vit des
milliers d'Algériens dirigés sur les champs de bataille étrangers arrêta
comme en 1914 les mouvements de lutte populaire jusqu'en 1941. Dans la
même année, des arrestations furent opérées dans tout le territoire de
l'actuelle Wilaya. Les Djidjelliens purent connaître dans les camps
d'internement, d'autres frères venus de toutes les régions du pays. Le
débarquement des troupes alliées en 1942-1943, favorisa la reprise des
mouvements patriotiques. Le principe de l'autodétermination était
solennellement proclamé par les alliés.
Mais
le 8 Mai 1945 Qui marquait la fin de la guerre fut pour
l'actuelle wilaya de Jijel, le théâtre d'un génocide, de Tamentout à
Beni-Aziz (Ex Chevreuil ), zone proche de Kherrata, ville martyre avec
Sétif et Guelma. Le bagne, les travaux forcés, les déportations et
l'emprisonnement devinrent le lot de ceux qui échappèrent à la mort. La
répression sévère, impitoyable est commencée…… j'ai vu dans les yeux
des chefs qui commandent les troupes….. la décision implacable d'être
sans pitié…. (Extrait du discours de l'Administrateur en chef de la
commune mixte de Jijel, Boissin rapporté par le ''Réveil Djidjellien ''
N°45 du 19 Mai 1945).
Le
premier novembre 1954 Ces mêmes populations des Dairates de
Fardjioua, El Miliia , Taher et Jijel, que les armées respectives, les
administrateurs, les Boisson , les Lochard et consorts, croyaient à jamais
jugulées , reprirent sans hésiter le combat libérateur. Acceptant tous
les sacrifices, elles allaient marcher les armes à la main, côte à côte
avec leurs frères et sœurs des autres régions d'Algérie jusqu'à la
libération totale de la patrie.
Région
montagneuse et couverte de forêts La wilaya de Jijel constituait
avec le massif de Collo, un bastion imprenable que ne purent réduire ni
les bombardements aériens, par vagues successives, ni les incendies de
forêts, ni l'artillerie, ni les tirs de la marine.
Aujourd'hui Comme
tous les Algériens, les Djidjelliens travaillent mais n'oublient pas leurs
morts. Au riant village de la révolution agraire Belghimouz-Medegri, un
petit monument expose un chapelet de bombe d'avions non explosées. La
stèle avec ses trois bombes rouillées, semble marquer à jamais, les forces
rétrogrades et obscurantistes qui voudront freiner la marche de l'Histoire
et celle du peuple vers le progrès. |




















































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